Le dimorphisme au prisme des Mille et Une Nuits
Posté par nofim le 30 juin 2014
Schéhérazade et la question dimorphique des vampires
par Jacques Halbronn
Nous avons récemment découvert des traces de
dimorphisme dans les « Contes arabes » des Mille et Une
Nuits. Rappelons que pour nous, il s’agit de monter la
dimension dimorphique d’une Humanité dont on sait
désormais qu’elle est la combinaison de deux évolutions
distinctes, celle de l’Homo Sapiens et celle de l’homme de
Néanderthal.
Or, que nous apprend la lecture des Mille et une nuits,
dont la traduction française de 1711 par Antoine Galland
fut la première en Europe? On s’intéressera au « cadre »
récurrent et non au contenu des ces « contes arabes » comme
on les appelle alors et ce cadre est probablement plus ancien
que son contenu lequel a pu varier au cours des siècles, dans
son parcours oriental (Inde, Perse, Turquie etc).
Le fil d’Ariane qui est censé relier ces centaines d’histoires
entre elles-ces 1001 nuits-est généralement perçu comme
étant la ruse d’une jeune femme pour échapper à une mort
annoncée, punition que le sultan entend infliger à toutes les
femmes de son royaume, en les faisant tuer au lendemain
de leur mariage avec le dit Sultan, puisque c’est du fait du
comportement de son épouse que le verdict a été prononcé!.
On nous dit donc que Shéhérazade, secondée par sa jeune
soeur, Dinarzade, qui l’accompagne au palais, trouve toujours un
prétexte pour interrompre une histoire commencée de façon
à ce que le Sultan sursoie à la régle qu’il s’est imposée.
Mais ce que l’on néglige de signaler et qui pour nous est
hautement significatif est le mode d’interruption qui va
s’appliquer.Et c’est celui-ci qui est reprise encore et encore
avec d’infimes variantes d’une fois sur l’autre : en voici
quelques échantillons édifiants:
-Sire, dit en cet endroit Scheherazade, le jour que je vois
m’empêche de passer à l’histoire du second calender(sic)
mais, si Votre Majesté veut l’entendre demain, elle n’en
sera pas moins satisfaite que de celle du premier. Le
sultan y consentit et se leva pour aller tenir son conseil »
autre occurence:
- Scheherazade allait continuer mais, s’apercevant qu’il
était jour, elle mit fin à son discours. Elle le reprit , la nuit
suivante…. »
-Scheherazade, en cet endroit , s’interrompit pour
avertir le sultan des Indes que le jour paraissait et elle
demeura dans le silence. La nuit suivante, elle reprit ainsi
son discours’
-La sultane Scherazade qui s’aperçut à ces derniers mots
que le jour paraissait, cessa de parler et garda le silence.
Elle reprit la suite de l’histoire la nuit suivante etc
Galland dans un Avertissement va interrompre le
procédé;
« Les lecteurs des deux premiers volumes de ces volumes ont
été fatigués de l’interruption que Dinarzade apportait à
leur lecture. (..) On trouve de ces contes en arabe où il
n’est parlé ni de Scherazade (…) ni de distinction par nuit.
Cela fait voir que tous les Arabes n’ont pas approuvé la
forme que cet auteur leur a donnée et qu’une infinité se
sont ennuyés de ces répétitions qui sont à la vérité très
inutiles. On avait voulu s’y conformer dans cette
traduction mais (…)on y a trouvé des difficultés si grandes
qu’on a été obligé de ne s’y plus arrêter. On est bien aise
cependant d’avertir encore les lecteurs que Scheherazade
parle toujours sans être interrompue »
Selon nous, les Mille et Une nuits véhiculent ainsi un module qui
nous renvoie à une très ancienne tradition dimorphique, du fait de ce qui n’est peut être qu’un
emprunt de circonstance, ce qui semble avoir échappé aux chercheurs. (cf Rima Labban, Les figures mythiques dans les Mille et Une nuits, Ed L’Harmattan 2013, Les mille et une nuits dans les imaginaires croisés, in Cahiers d’Etudes Maghrébines; n°6-7, Cologne, 1994, présentation Lucette Heller-Goldenberg))
Le fait en effet que le récit se suspende avec l’arrivée du jour n’a rien d’insignifiant et semble avoir été occulté par l’idée de la ruse
de Shéhérazade. Or, cette ruse ne fait sens que selon un certain contexte très particulier, qui relie selon nous les femmes au monde
de la nuit, ce qui n’est pas sans évoquer pour nous la question des vampires. Il ne semble pas que les historiens des vampires aient
intégré dans leur corpus les Mille et Une Nuits.
Or, qu’est-ce qui oblige Schéhérazade à suspendre son histoire de façon abrupte au lever du soleil, argument que le sultan
entérine sans la moindre difficulté comme s’il s’agissait d’une évidence? Selon nous, cette pratique renvoie à la condition des femmes,
population qui est très présente au tout début du dit « recueil » et qui a un mode de vie séparé. Les vampires aussi voient arriver
le jour comme instaurant une sorte de barrière infranchissable. On note d’ailleurs que l’ouvrage de Dom Augustin Calmet, Dissertation sur les Vampires . ( Présenté par Roland Villeneuve, Ed. Jérome Millon 1998) est contemporain de la mode des Mille et
Une Nuits en France. étant paru en 1751. (cf Colloque de Cerisy, Les Vampires, Ed Albin Michel, 1993. Un autre indice de cette
mode de l’immortalité en ce premier XVIIIe siècle concerne le Comte de Saint Germain , personnage qui semble voué à l’immortalité (cf Serge Hutin, L’ésotérisme de l’Histoue. De l’atlantide aux Etats Unis, de Cagliostro à Mary Poppins, Diffusion Rosicrucienne 2002, pp. 109 et seq, qui en dépit de
sa large culture ne semble pas avoir abordé la problématique Schéhérazadienne)
Si nous nous référons à la thèse des deux humanités qui cohabitent, on dira que l’une avait un mode de vie diurne et l’autre un
mode de vie nocturne, plus lié à la parole puisque dans l’obscurité on ne peut communiquer et faire acte de présence que par le biais
du son. A quoi tenait cette vie circonscrite dans les « cavernes » et s’interdisant d’aller au grand jour? Peu importe! On peut
supposer par exemple qu’elle s’y trouvait réfugiée, reléguée du fait de périls qu’elle ne pouvait affronter alors que l’autre humanité
n’avait pas ou plus eu à subir ce modus vivendi. On retrouve d’ailleurs les réminiscences d’un tel comportement dans l’inclination
des femme à communiquer de façon persistante; attachant d’ailleurs moins d’importance à ce qui est dit qu’à la marque d’un vivre
ensemble.
Les histoires de vampires dont les Mille et Une Nuits seraient une expression remarquable véhiculent cette idée d’un
dimorphisme, d’une humanité paralléle. On peut aussi trouver des allusions à cette dualité dans le récit de la Création. On nous objectera probablement que ces deux humanités comportaient à l’origine une population mixte. Pour en arriver à la symbiose actuelle qui fait cohabiter les deux ensembles, il aura fallu des aménagements (cf les ouvrages de Zecharia Sitchin et précédemment de Jean Sendy, à partir de Gilgamesh et de la Bible). En effet, pour nous, l’intérêt de l’histoire de Shéhérazade tient à l’accent mis sur
le comportement féminin. C’est la femme qui se régle selon l’avénement du jour et qui reprend son propos la nuit venue. On a là
un maillon manquant qui permet d’associer les femmes avec les vampires en dépit de l’image d’un Dracula. Ajoutons que la mort est
un vecteur récurrent qui traverse tout le corpus des Mille et Une Nuits. Schéhérazade, d’une certaine façon, est immortelle, en
ce qu’elle ne cesse d’échapper à une fin pourtant annoncée. (cf S. Hutin, L’esotérisme de l’Histoire, op. cit. pp 381 et seq « La mort
vaincue »)
Rappelons cette définition du vampire (cf F. Lacassin, Intr. Vampires. Une anthologie, Ed Barthillat 2008, p. 8): « C’est au siècle des
Lumières que les vampires sont sortis des ténébres (..) « Le vampire (…) est simplement un humain qui s’affranchit de la loi commune. Placé devant les portes de la mort, il retarde pendant des siècles l’obligation de les franchir, en sortant chaque nuit de sa tombe pour sucer le sang des vivants » Or; l’histoire de Schéhérazade est bien celle de quelqu’un qui parvient à « retarder » indéfiniment une
échéance fatale.
JHB
30 06 14
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