La Clef de la Géomance de Girard de Cremone par Luc Antoine Salerne.
par jacques Halbronn
En 1661 , l’année de la parution posthume de l’Astrologia
Gallica de Jean-Baptiste Morin (dit de Villefranche), parait
une traduction de la Géomancie Astronomique de Girard (sic)
de Crémone pour scavoir les choses passées, les présentes et
les futures. Chez le sieur de Salerne (Luc Antoine Salerne), admirateur du Comte
de Pagan, une des figures de proue de l’astrologie française du
siècle, lequel Salterne est aussi le traducteur
de ce texte médiéval (en fait de Gerard de Sabionettta) et qui y ajoute une « Clef pour
faire les Figures et en juger facilement, qui servira aussi
pour avoir une parfaite intelligence des Horoscopes, avec
deux alphabets de Nomancie, aussi pour deviner toutes
choses »". D’autres éditions suivront en 1669 (BNF V 21848) , toujours chez Salerne et en 1687 ( cette fois chez
Laurent d’Houry, BNF V 21818) L’éditoion de 1669 comporte une Epitre à Gaspard Marie Crollalanza, de l’ordre des Théatins
(datée de Mai 1669) absente de l’édition de 1661 (frontispice reproduit en fac simile dans la réédition de 1946)
Nous poursuivons notre panorama des ouvrages réédités
au cours du XXe siècles et parus au cours des siècles
précédents. Cet ouvrage est le premier que Volguine publia,
dès 1946 dans une collection qui allait connaitre un certain
succés « Les maîtres de l’occultisme » et dont nous avons déjà
évoqué l’existence à propos du traité des jugements des
thèmes généthliaques de Rantzau qui paraitrait
l’année suivante et qui était paru en français en 1657, à
Paris. Interessante cohabitation qui annonce le traité d’
Etteilla de 1785 déjà abordé.(L’Astrologie du Livre de Toth
Ed Trédaniel 1993)
Le lecteur peu averti ne peut qu’être interpellé par le recours à une
terminologie astrologique dans un traité de géomancie.
D’entrée de jeu l’auteur du traité déclare « L’Astronomie est
une science trop longue et trop difficile pour pouvoir en tirer
un jugement convenable. Les yeux de l’entendement ont de
la peine d’en regarder seulement une partie et peu de
personnes sont aujourd’hui capables d’en faire de vraies
prédictions. Nous avons composé cet ouvrage et lui avons donné
le nom de Géomancie Astronomiquee pour enseigner avec
moins de travail et de peine la manière de bien juger car, dans
cette science, il n’est pas nécessaire d’observer’ l’Ascendant ni
l’heure de naissance comme il se pratique dans l’Astrologie »
Il es proposé de faire un tirage géomantique qui fixe
l’Ascendant et par là les douze maisons de l’horoscopen dès lors
qu’à une figure géomantique correspond analogiquement un
signe du zodiaque. On retrouve ce principe dans les maisons
solaires, calculées d’après la position du soleil, mois par mois, ce qui .
qui évite de devoir déterminer l’Ascendant et donc de se
priver du dispositif des maisons astrologiques. De la même
façon, l’on situera les planétes dans les maisons par le biais
d’un tirage géomantique, sans aucun respect d’une quelconque
vraisemblance astronomique.(question des élongations de
Mercure et de Vénus). On ne renonce donc pas à l’Ascendant
mais on le calcule autrement, ce qui revient d’une certaine
façon à une forme d’astrologie « horaire » que rejetait le dit
Morin et que pronait en revanche outre Manche un William
Lilly (Christian Astrology, cf notre postface à l’édition du
traité de Claude Dariot, Ed Pardés 1990) Pour actionner
le systéme en question, on doit notamment recourir aux
Dignités planétaires car il y est questiion du « Seigneur »
de telle maison dans telle maison – ce qui recoupe
la technique des « maîtrises » encore en usage chez une
grande partie des astrologues français actuels (comme
Didier Geslain, voir sur You Tube) L’intérêt de cette
technique est de relier les maisons entre elles et donc
d’asseoir le propos divinatoire.
En réalité l’essentiel du volume est constitué par l’apport du
tradducteur. Examinons le récapitulatif du savoir/jeu astrologique
figurant dans sa Clef de la géomancie par Salerne qui fait suite.. On relève que- la queue et lâ tête du Dragon sont
ajoutées au Septénaire. En ce qui concrne les noms des
signes du zodiaque à la fin du XVIIe siècle, on notera
que le Bélier est souvent désigné comme Mouton, les
Gemeaux comme Bessons, le Cancer comme l’Ecrviesse
le Sagittaire comme l’Archer.
Par ailleurs, les domiciles des planétes -diurne et
nocturne- sont appelés « maisons ». L’exil (à l’opposé
du domicile) se nomme « détriment ». Le trône,
contrairement à la pratiqu actuelle, n’est pas synonyme
de domicile mais désigne le domicile le plus favorable
le taureau pour Vénus, la vierge pour Mercure (bien
qu’aussi son signe d’exaltation), le verseau pour Saturne, le
Sagittaire pour Jupiter et le scorpion pour Mars. Les joies
sont également rappelées: Soleil en maison IX, Lune en
maison III, Vénus en V, Mercure en I, Jupiter en XI,
Saturne en XII et Mars en VI. Les Quatre Eléments sont
Signalés en rapport avec les « triplicités » tout comme les
signes masculins et féminins. On nous indique aussi
l »Amitié et inimitié des planétes entre elles »
Il nous apparait, en tant qu’historien et ethnologue des
pratiques astrologiques que le « thème » est avant tout
constitué de la relation entre maisons et planétes et que
les signes ne servent ici que d’articulation entre maisons.
En effet, dire que telle maison est liée à telle autre tient
au fait que la planéte qui domine le signe où se trouve la
« pointe » (cuspide) de la dite maison (ou lieu)se trouve dans telle
autre. En fait, on peut même dire que seule importe la
connexion entre les douze maisons du thème et non la
nature de la planéte ou du signe, si ce n’est en raison du
lien entre signes et planétes.
Autrement dit, les rapports planétes-signes ne sont
qu’un processus de mise en rapport des maisons
astrologiques entre elles. Même dans le cas de l’Ascendant,
le signe n’est pas interprété mais on regarde quelle est
la planéte qui est « seigneur » du dit signe.
Une telle façon de procéder se retrouve étrangement
dans l’utilisation des Quatre Eléments en Astrologie, où
l’on comptabilise le nombre de planétes non pas dans
chaqu signe mais dans chaque triplicité, la nature des
planétes étant indifférente.
On serait donc face à une astrologie des Eléments et des
Maisons bien plus que face à une Astrologie des Planétes
et des signes.
17 07. 14