André Barbault, années 50-60
Posté par nofim le 11 août 2014
André Barbault (né en 1921), la trentaine et la quarantaine
par Jacques Halbronn
En 1955, André Barbault publie chez Grasset une Défense
et Illustration de l’Astrologie. Grasset (qui avait publié Proust
et les Protocoles des Sages de Sion) avait publié les trois traités
astrologiques de Maurice Privat dans les années trente.
Jusque là Barbault n’avait publié qu’à compte d’auteur comme
il est indiqué dans la bibliographie placée en tête de l’ouvrage.
La collection dans laquelle parait la « Défense » se nomme
Correspondances et est dirigée par Raymond Abellio et
un ouvrage de Paul Sérant y était déjà paru « Au seuil de
l’ésotérisme ». On est dans le ghetto des études ésotérique, d’une
certaine contre-culture. .
Barbault est alors âgé de 33 ans (l’ouvrage parait en juin et
il est né en octobre). Il est indiqué sur la page de garde
qu’il est « vice-président du Centre International d’Astrologie ».
Les années 53-54 ont été assez fécondes. Il y a eu le Congrès
International d’Astrologie, au Palais de la Mutualité pendant
les fêtes de fin d’année 53 dont il sera un des animateurs. Avec
Claire Santagostini, il publie un cours ronéoté dont il
s’inspirera pour certains chapitres de sa « Défense » (cf infra).
-L’Astrologie en liaison avec les typologies- et il a dirigé
trois collectifs avec des membres du CIA: Soleil-Lune,
Jupiter-Saturne et (avec Jean Carteret) Uranus-Neptune.
Barbault en 54 occupe une place centrale dans le milieu
astrologique français puisqu’il vient d’être élu Président
de la Fédération Française d’Astrologie qui associe
notamment le CIA et le Collége Astrologique de France,
dont le fondateur Néroman vient de mourir;
Barbault y fait référence (Défense, p. 52):
« Actuellement, une tentative de groupement de tout le
mouvement astrologique français est poursuivie sous
l’égide d’une « Fédération Française d’Astrologie » laquelle
a tenu un congrès à Strasbourg, où fut envisagé la création d’une
Fédération Internationale d’Astrologie » Barbault
dirige la revue Astrologie Moderne qui est l’organe du CIA.
Dans la foulée, Barbault publiera en 57 aux Editions du
Seuil avec les membres du CIA douze volumes sur les signes
du Zodiaque. Notons qu’Armand Barbault, son frère aîné
avait joué un rôle important dans les premières années
du CIA, à la fin des années 40…En 1958, un accord entre le
CIA et les Cahiers Astrologiques se met en place et qui
confère à l’association un organe de qualité pendant dix ans. En
68, le CIA publié la revue L’Astrologue avec un partenariat
avec les Editions Traditionnelles, sous la direction du dit
André Barbault. Mais cette même année 68 est aussi
celle de la crise déclenchée par Astroflash et Barbault
quitte sa « vice-présidence » et la revue L’Astrologue se sépare
du CIA, Barbault restant à sa tête…
Ajoutons que les années soixante voient Barbault publier
au Seuil De la psychanalyse à l’Astrologie et le Traité
Pratique d’Astrologie, Albin Michel sa « Crise mondiale de 1965″
(dans la collection « Aujourd »hui » et Jean-Jacques Pauvert
« Les Astres et l’Histoire » (1967). Nous sommes donc là
face à une période assez glorieuse qui va de 1953 à 1968, sur
une quinzaine d’années. En Mai 68, Barbault est âgé de 46
ans. Son point faible, ses activités ne dépassent pas le cadre
d’un certain milieu assez marginal si ce n’est qu’il touche un
large public avec les signes du Zodiaque et Astroflash, soit
l’interprétation des thèmes par ordinateur.
Examinons le contenu de cette Défense et Illustration
de l’Astrologie qui est l’occasion de présenter et de
représenter l’astrologie. Cet ouvrage est marqué par deux
parutions : le Que Sais-je sur l’astrologie de l’astronome Paul
Couderc (PUF, 1951 , collection dirigée par Paul Angoulvent)
et l’Influence des Astres du statisticien Michel Gauquelin
(Ed du Dauphin 1955), campé comme un adversaire converti.
1955, c’était il y a soixante ans…
En tant qu’historien des textes astrologiques, on nous
excusera de nous interroger sur les sources de cette
Défense. E, 1976, aux Ed. Traditionnelles,
Claire Santagostini éditera sous le titre « Initiation à
l’Astrologie Globale » un cours donné « pendant l’hiver
1953-1954″ (Préface p.. 7) et qui comporte notamment
(pp. 10 et seq « la morphologie planétaire ») un développement
très proche de celui de la Défense (« la morpho-psychologie,
pp.149 et seq) Dans les deux cas, il est fait référence à
Maurice Munzinger et on y trouve notamment à peu
près les mêmes tableaux, les mêmes schémas » (dont
certains seront repris dans le Traité Pratique de Barbault
en 1962)
On notera en particulier des convergences sur les Ages de
la Vie (que l’on retrouvera aussi, en 1964, chez Jean-Pierre Nicola,
sous le nom de « théorie des Ages »):
Santagostini (pp 15 et seq):
« La trajectoire de l’existence ou les Ages de la Vie »
« La trajectoire des âges de la vie et l’ordre traditionnel
des planétes.
« L’ordre des planétes correspondant
à la succession des âges de la vie n’est pas arbitraire. Cet
ordre est en accord à la fois avec la tradition astrologique et
avec la réalité astronomique des différentes vitesses de
révolution des planètes ou de la durée de leur cycle, en
commençant par la plus rapide, la Lune ( 27 à 29 jours
autour de la Terre ) et en terminant par la plus lente : Saturne
(29 ans) «
André Barbault (pp. 155 et seq)
« Les âges de la vie ».
« Plaçons-nous maintenant au point de vue du
déroulement des âges de la vie :nou ne ferons que suivre
ici l’ordre traditionnel et astronomique (vitesse des
planétes). Les premiers âges, Terre et Lune, sont sous
l’effet statique du froid (…) et le dernier Saturne
sous l’effet du désséchement et du refroidissement »
du desséchement »
Le passage de Barbault sur les Aspects (pp. 129 et seq)
appelle un commentaire de notre part:
« Réparties autour de la sphère du ciel, les planétes forment
une constellation qui change continuellement et ne se
renouvelle jamais. Cette constellation est surtout
caractérisée par des rapports précis entre certaines
planétes d’une part, entre planétes et axes terrestres
d’autre part (…) Le principe de l’aspect se dégage de la
notion de « conjonction » (-…) Les deux astres sont alors
« fondus » en un tout «
Du point de vue de l’astrologie de 2014, nous ferons les
observations suivantes qui expliquent selon nous que
l’astrologie ainsi présentée n »était pas viable .
1 insister sur le fait que la « constellation » formée par les
astres du ciel ne se retrouve jamais nous apparait comme
une vérité au regard de l’astronomie mais comme une
approche suicidaire pour l’astrologie laquelle a tout
intérêt à montrer au contraire l’importance de la
répétition de la même cyclicité au cours des siècles..
2 Barbault fait totalement l’impasse sur les étoiles fixes et
n’envisage à aucun moment des aspects entre planétes et
étoiles fixes
3 Barbault parle des « mélanges » entre planétes alors
que les planétes sont des entités autonomes qui ne
se mélangent pas et dont la course en revanche est
balisée par leurs aspects avec les étoiles fixes, qui sont
des points neutres, tout comme
le soleil indiquant un signe n’intervient pas en tant
qu’entité porteuse d’une signification spécifique mais
comme un vecteur astronomique…
C’est dans la Défense, que l’on trouve mise en avant 1989
et le cycle Saturne-Neptune (p. 189) « A la conjonction
de 1952-1953, Saturne meurt et l’URSS est en pleine
métamorphose : elle engage un nouveau cycle qui la
conduit à l’échéance capitale de 1989″
Le hic, c’est que Barbault va par la suite s’intéresser de
très près au trigone Saturne-Neptune et en 1963, huit ans
plus tard, il publie « 1964. La crise mondiale de 1965″:
« La pendule de Moscou sonne l’heure du trigone Saturne
-Neptune qui va être exact entre juin 1965 et novembre 1966
(…) Trente cinq ans plus tôt (1929) c’était l’heure du plan
quinquennal qui lançait l’URSS sur le chemin de la grande
expansion économique : un hasard (…) veut que le plan
quinquennal des Soviétiques ait échéance en 1965 (…) En 1965,
l’URSS entre à coup sûr dans la phase d’un grand essor
économique (.) Ce qui est surtout frappant, c’est le contraste
que produit la simultanéité de l’opposition Saturne-Uranus
et du trigone Saturne-Neptune (.) Que les Russes soient à la
tête de la course à l’espace est symbolique du proche
avénement de l’URSs en tant que leader du monde (..) Tout
donne à penser, finalement, qu’arrivée à l’opposition
[Saturne-Neptune, à 18 ans de la conjonction] de 1971-72,
l’URSS vivra un tempsde dépassement en ayant « doublé »
les USA et un temps de déclin en étant doublée par la Chine
à la tête du mouvement révolutionnaire mondial ». Tout cela
relativise beaucoup l’échéance de 1989 car à entendre
Barbault, tout aurait du se jouer dès 1965, au trigone..
Que s’est-il passé? Barbault aura voulu baliser le cycle
Saturne-Neptune et ne pas s’en tenir à une conjonction tous
les 36 ans. Il a eu l’impression que l’Histoire se précipitait et
n’a pas voulu être prise de vitesse. Il s’est donc reporté sur
le tiers du cycle de 36 ans, ce qui donne 12 ans, ce qui
permettait de gagner 24 ans et donc de « tenir » 65 sans
avoir à attendre 89 et ce d’autant plus que 1965 est aussi
l’année de la conjonction « américaine » Saturne-Uranus.
Quelques commentaires: l’importance accordée au trigone
comme aspect bénéfique fait en soi probléme, même si
elle est traditionnelle. Que nous dit Barbault sur les « bons »
et « mauvais » aspects dans sa Défense de 1955? Revenons à
son développement sur le sujet : « Il existe des aspects
harmoniques (sextile 60°, trigone 120°) Ces aspects
permettent un heureux accomplissement (…) En revanche,
il existe des aspects dissonants » (90° 180°)(pp. 129-30)
Ce rendez-vous pour 1965 était un peu un « quitte ou double »
et l’astrologie ne pouvait passer à côté d’une telle
opportunité. Et du coup l’échéance de 1989 apparaissait
comme beacoup trop lointaine. Barbault se souvenait
des mésaventures de certains astrologues à la veille
de la Seconde Guerre Mondiale – comme Léon Lasson- qui
avaient manqué une proche échéance en raison de la
fixation de dates trop tardives. Il ne fallait pas qu’une
telle mésaventure se reproduisît!
Dès ‘l’échec de 1965, Barbault allait revoir sa copie et en 1967,
on l’ a dit il publie « Les astres et l’Histoire » qui fonctionnent
sur une autre base que l’on peut qualifier de « globale ». Il
ne s’agit plus d’assigner une conjonction à un pays donné mais
de considérer l’équilibre mondial dans son ensemble, sous
la forme de toutes les conjonctions se formant entre les
cinq planétes les plus lentes: Jupiter- Saturne-Uranus-
Neptune-Pluton. Mais cette fois Barbault se donne du
temps. La conjonction Saturne-Neptune n’est plus
qu’une configuration parmi tant d’autres et l’échéance
cruciale est reportée à la décennie 80. Barbault a renoncé
à jouer avec une actualité trop chaude et prend le risque
d’être pris de court. Les années 70 à l’horizon
semblent dès lors être marquées par une certaine « détente »,
du fait que les conjonctions se raréfient. Etrangement, cette
détente est marquée, selon Barbault, ar des oppositions devenues entre
temps des aspects de relâchement de tension. C’est dire
que Barbault est disposé à remettre en question certains
dogmes traditionnels.
Nous n’épiloguerons pas sur la façon dont Barbault aura
vécu les années 70-80. On dira que ce fut une période
éprouvante à plus d’un titre qui se conclura par la réussite
de son pronostic pour 1989 si ce n’est que ce n’est pas
le succés de l’URSS qui est au rendez-vous mais son
ébranlement. Mais les astrologues ne retiendront que deux
mots: la date et le lieu.
JHB
11 08 14
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