Jacques Halbronn Temps indéfini ou temps cyclique? Le cas de l’événement unique à célébrer.
Les débats actuels autour des enjeux électoraux révélent une sorte d’idéologie du temps indéfini, illimité. C’est ainsi que le référendum de 2005 est présenté comme exprimant une réponse définitive qui ne saurait être remise en question. C’est la position d’un Michel Onfray qui crie au scandale parce que les conclusions du dit référendum ont été réaménagées par la suite. Vox populi, vox Dei.
Lu dans la revue Front Populaire:
« Les 15 ans du « non » au référendum
Il y a quinze ans, le 29 Mai 2005, près de 55 % des Français rejetaient le projet de traité établissant une constitution pour l’Europe. Une formidable expression de la souveraineté nationale qui sera désavouée trois ans plus tard, lorsque députés et sénateurs adoptèrent le Traité de Lisbonne, au mépris de la volonté populaire ».
On entend ainsi certains décréter qu’un réferendum devrait fixer des lignes pour le long terme alors même que le dit réferendum ne peut s’inscrire que dans une certaine conjoncture. Tout se passe comme s’il y avait la volonté de figer les choses une fois pour toutes et que l’important n’était pas tant ici le contenu que la forme. Abordons à présent un autre sujet d’actualité, à savoir le « miracle » de la Résurrection de Jésus, présenté comme la pierre de touche du christianisme. Là encore, un instant T se voit doté d’un impact indéfini, ad vitam aeternam. A cette approche, nous opposerons celle de temps cyclique, à savoir l’existence d’une dialectique du flux et du reflux et le maintien de cette dialectique à travers le temps.
Or, la doctrine chrétienne nous présente la dite Résurrection pascale comme un événement inoui, unique en son genre, ce qui renvoie à l’idée d’un temps « indéfini ». Or, il semble bien que certaines religions étaient axés sur le retour d’un phénoméne récurrent, ce qui va à l’opposé du temps « indéfini », permanent, pérenne, constant. Le miracle, ici, est, selon nous, de l’ordre du recommencement, d’une attente d’une nouvelle manifestation..
Force est de constater que le christianisme s’est fixé sur un seul événement, non reproductible, qui est la Résurrection, le retour du monde des morts, ce qui nous oblige à survaloriser le dit événement sur la base de témoignages anciens. Imagine-t-on que l’on nous parle d’un phénoméne qui n’est pas censé se reproduire, et donc s’observer!
Jean Michel Castaing (aletheia) n’écrit-il pas :
« La résurrection de Jésus nous rejoint aujourd’hui parce qu’elle fut un événement réel, objectif, qui avait besoin de témoins pour prendre tout son sens. Les apôtres furent les témoins de cet événement qui bouleversa leurs vies – comme il peut transformer la nôtre dès maintenant.
« La Résurrection de Jésus est un fait objectif. Bien que l’événement n’eût aucun témoin et qu’il transcende nos cadres spatio-temporels habituels (par lui Jésus entre dans la vie divine), cependant il s’inscrit dans notre histoire. En effet, la Résurrection est arrivée à un moment bien précis du temps, et elle a touché une personne qui a vécu une existence terrestre »?
Pour nous, en tout cas, il s’agirait là d’un contre-sens théologique lequel ne saurait se dissocier d’un processus cyclique et donc reproductible, selo une certaine exigence épistémologique. Ce qui a été sera. Un phénoméne ne saurait être cantonné au passé mais se doit d’être manifeste ici et maintenant. Prenons le cas du génie. Devrait-on se contenter d’évoquer des génies du passé? Heureusement, tel n’est nullement le cas et chaque génération peut se glorifier d’un certain nombre de génies, de « justes » (selon la terminologie liée à la discussion autour du sort de Sodome et Gomorhe. De même, toute naissance présente un caractère merveilleux et cela vaut pour la naissance de Jésus mais nous savons que le « miracle »‘ de la naissance est constamment attesté et n’a pas à être célébré comme un évenement révolu. C’est d’ailleurs toute l’ambiguité du processus de célébration, comme dans le cas de la Sortie d’Egypte, célébré à Pâques. Tout miracle est voué à se répéter périodiquement, même si l’on peut essayer d’en déterminer la première occurence. Par ailleurs, la grandeur d’un pays ne saurait se réduire à quelque événement aussi remarquable serait-il mais exige des confirmations régulières sinon on bascule dans le « has been ». Et d’ailleurs, cela deviendrait l’exception qui confirme la régle, ce qui montre bien que nous n’accordons de peu de crédit à ce qui ne peut se rééditer, comme dans le cas d’un sportif qui se glorifierait d’un exploit qu’il ne serait pas en mesure de renouveler.
JHB 18 04 22