Signifiant et signifié: une nouvelle approche
Posté par nofim le 19 février 2015
Faut-il repenser Saussure au regard du signifiant/signifié?
par Jacques Halbronn
Il nous apparait que le clivage entre signifiant et signifié
se situe au sein même de la langue et non point entre la
langue et le monde, les mots et les choses. Une langue
n’est pas un tout à considérer comme étant d’un seul
tenant.
Nous opposerons ainsi le nom et l’adjectif, le verbe et
l’adverbe, le sujet et le complément d’objet, c’est à dire
l’élément central et ce qui vient le prolonger de diverses
façons. De même, nous distinguerons entre le radical et
les flexions susceptibles de l’affecter (préfixes, suffixes,
dérivés)
Autrement dit, le signifiant se décline au prisme d’une
constellation de signifiés qui sont satellisés autour de
lui. Nous dirons que le signifiant est un contenant et les
signifiés des contenus affectés à un signifiant donné.
Comme on l’a dit dans un précédent texte, le signifié
vient préciser le signifiant tout en l’appauvrissant, en en
réduisant le champ des com-possibles. Le passage du
signifiant au signifié est celui de la puissance à l’acte.
Parmi l’infinité des signifiés possibles pour un signifiant
donné, un choix s’opére nécessairement dans un certain
espace-temps.
Si l’on prend l’exemple du dictionnaire, le signifiant est
le mot qui constitue l’entrée et tous les mots qui servent
à le définir sont des signifiés. Et ainsi à tour de rôle. C’est
un signifiant conjoncturel et non plus structurel.
En principe, comme son nom l’indique, un signifiant
n’est pas censé être associé à un signifié plutôt qu’à un
autre. Chaque locuteur a le droit de se servir d’un
signifiant comme il l’entend mais cela ne va pas sans
quiproquo si chacun croit l’entendre pareillement. D’où
l’importance des adjectifs et des adverbes qui ont
vocation à préciser et qui sont en fait mieux circonscrits
dans leur signification que les signifiants, d’où leur nom
même de signifié, qui indique un fait accompli, sans appel.
Autrement dit, l’apprentissage des adjectifs et des adverbes
devrait être prioritaires en ce qu’ils sont les vecteurs
d’un certain manichéisme comme bon et mauvais, bien
et mal etc.
Ce n’est point là une nouveauté puisque les langues sont
décrites depuis longtemps au moyen d’une telle
terminologie que chaque éléve apprend très tôt à
utiliser et à repérer. Le préfixe « ad » est par lui-même
tout à fait parlant (adjectif, adverbe) tout comme
d’ailleurs le terme de « pronom » qui veut bien dire
ce qui se met à la place du nom.(pronoms possessifs,
personnels). Il en est d’ailleurs de même de l’article
(défini et indéfini) qui a bel et bien une valeur
pronominale. D’où en espagnol, par exemple, « El » qui
signifie aussi bien l’article défini que le pronom
personnel à la troisiéme personne qui est selon nous
le cas matriciel. En italien, le rapprochement est
également assez flagrant : il, ello. En français, le lien
entre l’article et le pronom à la troisiéme personne du
singulier s’est perdu. ( article Le et pronom personnel il)
Cela tient à l’emprise de la forme accusative se substituant
à la forme nominative : je le vois, je lui parle.
Dans certaines langues, le rapprochement
entre ces deux catégories est en effet moins flagrant du fait d’une
corruption du système de la langue. En allemand, le Der
(article défini au masculin ) est à rapprocher du « Er » (troisiéme personne du masculin singulier)
et le Die (article au féminin) du Sie (au féminin) et le Es
(pronom neutre) du Das (article neutre)
Quant à l’anglais, on pourrait rapprocher l’article « the » du
pronom personnel au puriel « they » (them, démonstratif
this, that)) alors que la troisiéme personne du singulier a perdu le t initial
(he).
On aura compris que la linguistique que nous
préconisons n’exclue pas la reconstitution d’un systéme
qui a pu se corrompre pas plus qu’elle ne considére tous
les mots d’une langue en vrac. Nous sommes très
conscients de l’impact des emprunts linguistiques
venant perturber l’ordre, l’agencement d’une langue et
si l’on admet que la langue est un outil, nous concevons
tout à fait que l’on puisse en améliorer l’ergonomie.
Nous dirons que le réseau de signifiants se situe dans
la subconscience du locuteur alors que celui des
signifiés se situe au plan du conscient. La preuve en est
que les gens sont bien plus capables de connecter des
signifiés entre eux que des signifiants. Même le lien
prendre/comprendre/apprendre n’est probablement
pas conscient dans l’esprit du locuteur français moyen
tout en jouant certainement un rôle à un certain niveau
et c’est le probléme des langues hybrides- comme l’anglais-
de disposer d’un réseau très médiocre de liaisons sur le
plan subconscient. (cf l’approche lacanienne)
JHB
22 02 15
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